Marc Berlie : Maître verrier souffleur de verre
C’est l’histoire d’un homme tranquille. Le jour de sa naissance, ce matin de février 1956, il ne le savait pas encore mais son destin était déjà lié à celui de la Verrerie de Biot puisqu’elle venait elle aussi d’ouvrir ses portes. « C’est vrai que nous sommes nés la même année elle et moi ! D’ailleurs, comme mes ancêtres, j’ai toujours vécu ici. Ma famille est installée à Biot depuis 500 ans ! » Confie Marc Berlie toujours amusé par l’anecdote.
Enfant, il vient donc visiter la fabrique un peu au hasard de ses découvertes. « Dès que j’ai vu la lumière des fours et cette grosse boule de verre… j’ai trouvé ça magique ! » Jeune apprenti à 18 ans, il observe, place les verres dans le four, apprend à aller le cueillir et franchit les 8 niveaux nécessaires ici pour devenir un véritable souffleur de verre. « Tous les gens qui touchent pour la première fois le verre s’en rappelleront toute leur vie ! Par contre il faut prendre son temps pour avancer. » Résolument décidé à s’armer de patience, il va petit à petit se prendre de passion pour cette matière vivante, chauffée à 1100 degrés et sans cesse en mouvement. « C’est le verre qui commande. Il faut le respecter. Si on veut aller trop vite ça ne marche pas. » Pichets, verres à pieds, tasses, il lui faudra dix années pour maîtriser les quelques 260 modèles proposés par la verrerie de Biot. Un verre particulier puisqu’il est bullé et coloré. Et c’est lors de commandes spéciales qu’il peut exprimer sa créativité.
Dans les années 80, la concurrence n’existait pas. On travaillait le verre à Biot ou on ne le travaillait pas. « Il y avait deux roulements, un le matin l’autre l’après-midi. Nous avions une formation unique et nous étions capable de fabriquer le verre de A à Z ! » témoigne t’il fier d’être de ceux qui ont connu la belle époque. Des années fastes, où ils étaient une quarantaine de verriers à l’atelier, il retient toutes ses créations mais aussi les liens d’amitiés.
« Je n’avais pas l’impression de venir travailler, je venais passer la journée avec des amis ! Qu’est-ce qu’on était bien ensemble. »
Une équipe soudée prête à relever les manches ensemble comme lorsqu’il a fallu reconstruire tout l’atelier après les inondations de 1995. « Cette catastrophe naturelle a été le pire moment de ma carrière ! Nous n’avons pas pu travailler pendant 2 mois. Alors on s’est tous mis ensemble pour nettoyer, remonter un nouveau four et se remettre à souffler le verre. »
Aujourd’hui quarante cinq années se sont écoulées et même si la technique artisanale et les outils sont toujours les mêmes, les verreries environnantes ont fermé et l’atelier s’est malheureusement vidé. « Nous ne sommes plus que 5 à travailler ici. La plupart des verres sont maintenant faits à la machine à l’étranger car cela coûte moins cher de cette manière. »
« Une machine vous sort 10.000 verres par heure. Moi je ne peux vous en faire que six dans ce même temps. »
Même si le savoir-faire de la verrerie de Biot sera amené à disparaître selon lui, Marc forme avec plaisir les jeunes de passage dans l’atelier. Ce qu’il aime aussi c’est partager sa passion. « Nous faisons partis des cents sites les plus visités de France, donc les gens passent tous les jours ici. C’est toujours un grand bonheur de montrer ce magnifique métier aux plus curieux ! »
A sa façon à lui aussi de profiter encore un peu de ce métier qui lui a tant donné. « Aujourd’hui j’ai l’âge de prendre ma retraite mais je ne me suis pas encore arrêté. Parce que j’aime trop ça ! Je viens travailler à pied, à 5 minutes de chez moi. Il n’y a pas de train ni de métro… Et puis de toute façon je n’ai jamais trop aimé le changement. »