Devenir céramiste : la reconversion réussie de Fabien Mérillon
Ces 10 dernières années, la création d’entreprises liées à l’artisanat a explosé en France. Ils sont couteliers, ferronniers, gantiers… Fabien Mérillon quand à lui s’est reconverti en céramiste et il propose aujourd’hui des stages à tous ceux qui souhaitent franchir le pas. Direction son atelier en plein coeur de Paris. Une rencontre passionnante!
Fabien, qui es-tu ?
Je suis un céramiste parisien ! Il y a 10 ans, j’ai décidé de monter mon atelier : le Gang des Potiers. C’est là que je fabrique et vends mes créations. Je donne aussi ici des cours et des stages de céramique.
D’où te vient cette passion ?
Je ne sais pas si on peut parler de passion. La passion est exclusive ! Mais je peux vous dire que tout est d’abord venue des tasses, assiettes ou sculptures que je pouvais voir en magasin ou sur les marchés. J’ai commencé à en faire en loisir avec l’idée que cela pouvait un jour devenir mon métier…
Comment as-tu abordé ta reconversion professionnelle ?
J’ai une formation en histoire de l’art et cinéma, mais j’ai exercé des métiers qui étaient totalement éloignés de ces disciplines. Je suis passé par le rédactionnel, l’internet et la communication. J’ai aussi fait de la vente en magasin et puis j’ai travaillé 5 ans au Ministère des Affaires étrangères. A la fin de mon contrat, je me suis lancé dans une formation professionnelle de 10 mois, afin de me préparer au CAP de tourneur en céramique. En parallèle je montais un dossier pour obtenir les prêts dont j’avais besoin pour lancer l’activité. Ce fut beaucoup de travail, et pas mal de patience avant de pouvoir trouver un local. Je m’étais fixé un but et je me suis totalement investi. Cela voulait dire aussi faire des petits boulots en parallèle le temps que cela aboutisse et que l’atelier devienne viable financièrement.
« Quand on se lance dans un tel projet, les journées sont longues et les week-ends n’existent pas ! »
Quels types de pièces réalises-tu ?
Il y a deux genres qui cohabitent. Les pièces utilitaires avec les tasses, sous-tasse, plats, vases etc… Après avoir travaillé la porcelaine qui alliait des couleurs fortes et des tracés pointillistes légers sur les surfaces que je laissais non émaillée, je travaille maintenant le grès dans un style japonais avec des textures proches de la cuisson au bois.
Je fabrique également quelques sculptures. Elles me permettent d’exprimer d’autres choses qu’un simple intérêt décoratif. C’est alors le support d’une idées, d’une sensation visuelle et tactile, d’une interrogation…
La pièce coup de cœur est souvent la dernière qui soit convenablement sortie du four !
Quelles sont les qualités requises pour exercer ton métier ?
Je pense que la patience, l’exigence et la ténacité sont les qualités les plus importantes. Le résultat n’est pas toujours au rendez-vous, mais lorsque cela arrive, la satisfaction est irremplaçable !
L’ouverture d’un four peut parfois se révéler cruel et ce même après des années de pratique !
Nombreuses sont les occasions pour se décourager et le doute n’est jamais loin. Parfois j’accumule les bonnes nouvelles mais parfois les ventes sont rares, il y a moins d’intérêt pour mon travail et mes dossiers de participations sur des événements sont refusés. Avec ce genre de coup dur on peu rapidement désespérer et c’est à ce moment là qu’il ne faut pas baisser les bras.
Comment expliques-tu l’engouement des gens pour tes cours ?
C’est vrai que j’affiche complet ! Je pense qu’ils ont simplement besoin de revenir à la matière. Nous sommes dans une société très désincarnée. Le virtuel a envahi notre espace, nous nous isolons facilement dans une interaction avec notre téléphone portable, même lorsque l’on est en compagnie. Le travail de la terre ou même d’autres matériaux, redonne la possibilité de créer du réel, d’être en groupe, dans un échange avec les autres.
La terre c’est aussi je pense une connexion « primaire », avec notre enfance, voir notre passé d’être humain, qui parle assez rapidement à beaucoup de personnes. C’est aussi une extension de soi même dans la matière, une empreinte qui se construit patiemment et qui se fige pour devenir un témoin de notre action, de notre style, de notre corps aussi. C’est une extension de soi et une reprise en main de son temps.
Où en es-tu aujourd’hui ?
Mon activité s’est bien développée ! Je participe à des salons destinés au grand public comme le festival de Mouffetard ou encore le festival de l’île Saint-Louis. Je suis également présent dans des boutiques comme Empreintes (Paris 3ème). La galerie Prisme (Paris 12ème) et la galerie Cara située sur l’île Saint-Louis.
Parallèlement à cela, j’ai développé mon offre de cours et de stages au sein de l’atelier où chacun peut venir se former aux différentes techniques du travail de la terre (tournage, modelage, émaillage…). D’autres collègues viennent également partager leurs savoir-faire.
C’est important de transmettre. C’est un moyen de répondre à l’intérêt que mon métier suscite, mais aussi de montrer sa réalité, et de le faire perdurer !
Beaucoup de gens rêvent de se lancer dans une reconversion professionnelle aujourd’hui.
Ce serait à refaire, tu te lancerais à nouveau ?
Bien-sur que oui ! Malgré les difficultés rencontrées et toutes celles qui m’attendent encore, c’est une formidable réussite personnelle. Si cela doit s’arrêter demain, ce ne sera pas un problème car c’est un projet qui a connu un aboutissement et qui maintenant se prolonge…
Fabien Mérillon – Le Gang des Potiers : 5 Rue Hippolyte Lebas, 75009 Paris (visitez son site en cliquant ici!)
Crédit photos : Jessica Lia & Fabien Mérillon